L’autre pays – Sébastien Berlendis
Paru en 2014 chez Stock, L’autre pays, est un roman de Sébastien Berlendis. Le narrateur nous conte un voyage dans le nord et le centre de l’Italie qui se conclut à Rome. En même temps, il convoque des souvenirs amoureux, son histoire familiale et les migrations italiennes d’avant et après la Première Guerre.
Des phrases de Sébastien Berlendis, nous retiendrons d’abord la simplicité. L’auteur ne s’embarrasse pas de longues circonvolutions, de digressions ampoulées et indigestes. Au contraire : tout est dit simplement, avec une pointe de minimalisme qui invite le lecteur directement au cœur du récit. Or, cette économie du mot permet la naissance dans ce court récit (70 pages) d’un sentiment d’appartenir au lieu, de faire corps avec l’histoire. L’auteur vient de la photographie et de fait, son écriture emprunte à celle-ci : le détail est présent, les scènes naissent puis disparaissent comme au sein d’un ouvrage de Lartigue ou d’un Plossu amoureux (Almeria ou Rome). Il y a aussi quelque chose de cinématographique dans L’autre Pays, les personnages principaux et secondaires évoluant à travers un décor de carte postale, une réalité qui s’échappe parfois vers la magie, les chapitres se succédant pareil aux plans d’un film qui serait ce séjour estival.
Parce que les textes sont comme ça : le concret cède peu à peu sa place à quelque chose qui oscille entre rêve et souvenir, fragments de mémoire et preuves tangibles de ce qui a été.
Il est intéressant d’ailleurs de constater que cet autre pays revient parmi plusieurs de ses ouvrages et qu’à chaque fois les thèmes de l’amour, la mort, le désir, le corps, la chaleur, et une exubérance contenue sont en contrepoints permanents. Est-ce une tentative d’épuisement du sujet ? De la mémoire ? Comme il peut y avoir des motifs photographiques auxquels nous revenons sans cesse ? Il est impossible de le dire. Alors qu’il a fait des détours ailleurs (Berlin et ses Seize lacs et une seule mer, par exemple), Sébastien Berlendis revient à l’Italie dans son dernier ouvrage Lungomare (Actes Sud 2024). Mais au fond qu’importe le lieu, puisque les mots plein de mélancolie viennent nous parler à l’âme.
La beauté ici transcende les jours et les heures, laisse au cœur une douce nostalgie. C’est très certainement ce qui est essentiel et ce qui fait que L’autre pays est à la fois unique et multiple.
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