Istanbul, will you still love me tomorrow – Jehsong Baak
Avec Istanbul, will you still love me tomorrow, paru aux éditions Loco, le photographe Jehsong Baak nous invite à une déambulation douce et mélancolique dans la ville turque. Il ne s’agit pas ici d’un reportage sur les Stambouliotes, d’un documentaire sur cette ville si particulière, mais plutôt d’une longue marche auprès de celles et ceux qui la font, qui l’habitent.
Fruit d’une résidence d’un mois en novembre 2019, les images pleines de délicatesse sont aussi un cri du cœur.
On se regarde beaucoup à Istanbul. Tendrement, avec humour, les yeux dans les yeux. On se regarde et on s’aime, parce que l’amour est là dans ces mains qui s’entremêlent, qui frottent les cheveux, qui caressent un visage. On s’aime à Istanbul, et on le montre. Loin de toute fausse pudeur, chacun, chacune, exprime sa joie, son amour. Pour son chien, pour ses enfants, pour l’autre, quel qu’il soit. Quand la nuit vient, quand les lumières bercent la ville, on croise des ombres qui préludent aux lueurs brillantes du matin.
Tout est calme, quiétude et tendresse. La vie va, la vie vient, heure par heure, moment après moment.
Jehsong Baak écrit en postambule de Istanbul, will you still love me tomorrow : « […] (les photos) recréaient – inconsciemment – l’enfance Joyeuse et insouciante et les parents aimants et protecteurs que j’aurais aimé avoir. »
Au-delà des religions, des âges, des genres, les images du photographe sur les Stambouliotes portent en effet quelque chose d’un immense amour, d’un grand respect et ces photos de rue invitent le spectateur à un regard sensible sur l’Autre.
Alors que trop souvent nos concitoyens nous sont au mieux indifférent, il existe quelque chose dans ce livre de l’ordre de la révélation. Oubliant les barrières qui nous séparent, qu’elles soient politiques ou religieuses, ce qui émerge ici, dans ces photographies, c’est la sensation d’une confraternité de fait.
Confraternité qui amène à la sensation presque physique d’unité.
Bien évidemment, il ne s’agit pas d’idéaliser la vile qui porte certainement en elle autant de souffrances, de violences et d’écarts que n’importe quelle autre. Mais le regard porté ici, le prisme par lequel sont saisis les mouvements, les regards, les lieux, est celui de la douceur, de la mélancolie et peut-être d’un regret porteur d’espoir.
On peut imaginer qu’il y a aussi une invitation qui est faite à voir les choses d’une autre manière. Alors qu’il venait d’arriver, Jehsong Baak explique qu’en contemplant cette foule il a soudain pleuré, lui qui ne pleure presque jamais.
Pourquoi ?
Peu importe après tout, le pourquoi. Il y a tellement de raisons possibles.
Néanmoins, une d’elles suffirait à expliquer ces larmes : la joie et le sentiment que tout ici va pour le mieux. Que tout ici ressemble à l’amour.
Istanbul, will you still love me tomorrow est un ouvrage qui invite à aimer, à prendre l’Autre non pas comme un intrus dans le déroulement de nos existences, mais comme un frère, une sœur semblable à nous.
C’est peut-être ça qui en fait un grand livre de photos de rue : cette impression tenace, même après qu’il soit refermé, que tout est simple, facile et qu’il suffirait aux humains de prendre le temps de regarder ce qui les entoure et de se/le respecter pour que les choses aillent bien.
Espérons qu’un ouvrage comme Istanbul, will you still love me tomorrow donnera envie à chacun, chacune de créer du lien.
42€
22 x 27 cm, 120 pages, 70 reproductions en trichromie, relié semi-toilé. Textes en français / English.
Conception graphique : L’atelier d’édition.
