Avant – Marie Bienaimé
La photographe Marie Bienaimé vient de publier aux Éditions Émulsion son nouveau livre. Intitulé Avant, c’est un voyage délicat dans le Maintenant, dans la fragilité de l’instant, dans sa magie et sa beauté. Le bleu de ses cyanotypes, parfois virés, laisse le lecteur dans un état de rêverie songeuse.
Des enfants, des enfants et la joie… Ils jouent, se baignent, se juchent, vivent. Des enfants comme des êtres lumineux incarnant tout ce qui fait la beauté de la condition humaine, tout ce qui en fait sa force.
Des paysages aussi, paisibles et denses, que l’on parcourt, que l’on habite, qui nous habitent.
Un oiseau s’envole, on se recueille devant les sépultures de nos ancêtres, la lumière caresse le monde.
Rien ne bouge, tout est là.
Mais, à bien y regarder, il y a tout de même cette tension sourde, celle qui laisse l’inquiétude naître. Réalisées durant la période trouble du COVID, les photographies de Marie Bienaimé sont autant un constat qu’un appel à l’attention
Le calme baigne le monde chaque matin, mais il ne tient à presque rien ; un minuscule virus et tout ce que nous tenons pour acquis bascule et disparait. En effet, cette période étrange qu’a été la pandémie laisse à la mémoire une marque indélébile. D’abord, il y eut la peur, sans cesse véhiculée par des médias peu scrupuleux, puis le confinement, ces moments clos dont nous ne savions combien ils dureraient. Les Hommes devaient s’autoriser à sortir, se limitaient à quelques pas et chacun s’effrayait de son voisin. Nous étions dans l’après. L’après de la quiétude, de la magie et de la poésie. Las, on clama haut et fort que le monde d’après ne serait plus une copie de celui d’avant.
Et pour tout dire, c’est vrai.
Si on regarde l’état actuel du monde, ses guerres infinies et meurtrières, les boues qui couvrent des fleuves devenus furieux, la rage de certains et les dépenses somptuaires pour promener une torche, force est de se rendre compte que les images d’Avant, que les photographies de Marie sont très loin de ce que l’on nous montre. Elles sont au contraire une dentelle délicate, une légèreté, un moment de grâce.
Pourtant, il faut peut-être voir dans ce livre une ouverture. Là où la photographe sait saisir et nous proposer un monde auquel nous ne sommes plus préparés, existe certainement une possibilité de retour. Est-ce parce qu’ils ont oublié la lumière, les joies enfantines et la délicatesse de la Nature que les humains en sont réduits à ces comportements grotesques ? Très certainement.
Alors que faire ? Accepter la chute de ce monde, cet effondrement qui nous semble parfois inexorable et infini ? Ou bien, chercher en nous ce petit peu de révolte douce, de refus timide de ce qui semble inéluctable ?
« Nos enfants le méritent. » écrit Marie Bienaimé. Oui, ils méritent que nous leur accordions autre chose qu’un regard à peine émerveillé qui ne dure pas. Ils méritent autre chose qu’une planète dévastée. Ils méritent autre chose que la guerre, la peur et la mort.
Parce qu’eux aussi ont connu avant et les matins de lumière, les jeux sans fin, le soleil, la rosée, les escargots et se déguiser en Chaperon Rouge.
Avant est un ouvrage d’une richesse incroyable, un manuel de bonheur et de joie. Parce qu’il montre, qu’il dit ce qui est et non ce qui existe. Il écrit les joies, les jeux, l’amour et l’espoir. Marie Bienaimé a su, un instant, ouvrir une porte sur un passé qui n’en est pas un. Tout ceci est présent, bien présent, infiniment présent et il ne tient qu’à nous de nous en emparer. Avant est un après, le seul après qui vaille le coup.
Ayons le courage de le faire !
35€
80 pages, imprimé en France sur Munken Lynx Blanc 150g.
5 couvertures différentes comprenant un tirage cyanotype original.
ISBN : 978-2-9582943-1-1