les oubliés – Fabien Dupoux

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©Fabien Dupoux

En ce XXIème siècle bien avancé, force est de constater que la mondialisation est bien autre chose qu’un mot manipulé par des économistes, qu’un concept débattu : c’est une réalité tangible. Elle concerne tout le monde, partout, aucun d’entre nous n’y échappe que ce soit en terme de transports, de communications, de choix de consommation. Le problème c’est qu’elle laisse dans son sillage quantité de réprouvés, de violences et de douleurs. Fabien Dupoux a parcouru le monde à la rencontre de ces parias de la richesse, de ces petites mains interchangeables, sans qui, pourtant, il n’y aurait simplement pas de mondialisation. A travers son livre les oubliés, paru chez Arnaud Bizalion éditeur, le photographe nous invite à un parcours parmi eux. L’ouvrage s’accompagne par ailleurs de deux textes : l’un de Jean-Christian Fleury qui explique l’importance de mettre en avant ces personnes, l’autre de Léo Charles s’interrogeant sur la possibilité d’une autre mondialisation.

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Il y a des rochers, de la pierre et des eaux bourbeuses. L’océan aussi, des mains déformées, des visages creusés de fatigue, puis des navires d’acier que l’on désosse pièce par pièce, des visages d’enfants, de femmes (et il est terrible de se rendre compte que celles-ci sont encore plus invisibles que les invisibles), des hommes exténués, des mines de souffre, des vapeurs délétères, la fatigue encore et toujours, la drogue qui aide à tenir, l’espoir qui n’est plus vraiment là, le vent, les nuages, les montagnes.

Des Hommes qui naissent, vivent et meurent, invisibles.

Les damnés de la Terre qui laissent penser que Zola, Steinbeck, Ponthus ont encore de beaux jours devant eux.

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©Fabien Dupoux

La mondialisation n’est pas, en soi, un phénomène récent. L’Empire romain, les Grandes Découvertes et les colonisations afférentes sont des mondialisations. Relier l’être humain via le commerce principalement, la guerre régulièrement, les Arts quelquefois n’est pas non plus un phénomène nouveau. La pauvreté, les marginaux, les réprouvés, les invisibles existent aussi depuis des millénaires. « Debout les Damnés de la Terre… » tonne l’Internationale. Mais, ce qui est nouveau c’est la forme actuelle qu’a pris la mondialisation avec ce visage ultra-libéral où le seul objectif est une croissance illimitée. Or, ce choix, cette orientation politique d’un accroissement sans fin des richesses, cause des dégâts aussi dramatiques qu’irréversibles. La Nature devient une sorte de réservoir où l’humanité puise sans limites et sans complexes. On produit, on extrait, on stocke, on vend et surtout on ferme les yeux sur les destructions irrémédiables. Surtout, aussi, on ferme les yeux sur la pauvreté endémique, sur les conditions de travail délirantes et mortifères que subissent une bonne partie de ceux qui contribuent à l’enrichissement des autres. Avec ses photographies, Fabien Dupoux lève le voile, montre l’envers d’un décor soi-disant rutilant. Nos richesses, notre confort se font au prix de lourdes pertes humines et naturelles. On stocke, on entasse, on travaille dans des conditions apocalyptiques. On vit de peu, de rien, gravissant des montagnes de déchets, laissant les enfants jouer ou travailler au milieu d’eux. Les cercles de l’Enfer de Fabien Dupoux sont aussi bien en Bolivie qu’en Indonésie, qu’au Mexique qu’en Inde.

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©Fabien Dupoux

Mais, les oubliés ne se contente pas de montrer. De nombreux textes, carnets de notes du photographe, relatent les rencontres, les discussions, les conditions de vie de ces gens. Qu’en retenir ? Que sans eux nous ne vivrions absolument pas comme nous le faisons. Que décider ? Au-delà de la prise de conscience que nos jolis téléphones portables, voitures, vêtements, que-sais-je encore, n’existeraient pas sans eux, il faut peut-être se projeter dans un modèle économique et social différent, plus humain et écologique. Pas le « capitalisme vert » dont on nous rebat les oreilles et qui n’est qu’une manière de perpétuer un modèle obsolète. « Boniments » dirait François Bégaudeau. Au contraire, il s’agit maintenant de se lever, chacun à sa façon, contre ça. Il y a des luttes à mener, des mots à écrire, des photographies à prendre pour mettre fin à cette mascarade délétère.

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©Fabien Dupoux

Fabien Dupoux avec les oubliés nous dresse un bilan sans concession mais nécessaire. Ses photographies portent l’altérité à un haut degré. Le photographe aime son prochain et veut, peut-être son bonheur, sûrement son bien-être. L’urgence est maintenant d’agir, de se battre contre les inégalités mondialisées. Transpire dans ces images qui devraient être d’un autre temps. Prenons en conscience ! Et la première chose à faire est peut-être de lire ce livre aussi nécessaire que primordial.

Pour suivre le travail de Fabien Dupoux

Le site d’Arnaud Bizalion éditeur

35€

FF 20,5 x 26,87 cm, 59 photographies

– 112 pages « images » sur Arctic Volume White 150 g, impression noir + gris pantone

– 24 pages « récit documentaire » sur Munken Print 115 g, impression noir R°V°

Façonnage dos carré cousu cousu, fil noir, bords francs

– Insert cahier 16 pages « traductions anglais », FF 21,2 x 26,87 cm, impression noir, 2 pts piqués métal

février 2023 ISBN 978-2- 36980-154-2 – EAN 9782369801542

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Frédéric MARTIN
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