Fragile – Pauline Alioua
©Pauline Alioua |
FRAGILE (handle with care) naît suite à un grave accident de la circulation dont est victime la photographe marseillaise. Lors de son séjour de deux semaines en réanimation, elle prend conscience de la fragilité des choses, en premier lieu de l’existence.
Le fanzine développe une narration complexe, intime et touchante autour de cette idée.
Un spray de gel de désinfectant, peut-être du gel hydroalcoolique, sur un guéridon paré d’une nappe blanche fait face à une main sur laquelle un pigeon est posé. A terre d’autres picorent.
Rien ne bouge, tout est immobile, serein.
Pourtant quelques pages plus loin un serpent ondule des voitures sont empilées, épaves d’acier ; une main posée sur un lit tient un téléphone. On l’imagine sonnant dans le vide.
Les tags évoquent Jésus-Christ fils de Dieu, les anges se voilent le visage et des néons blafards hantent le crépuscule.
Il règne une atmosphère de fin du monde, d’angoisse existentielle, d’amours incertaines. Les dieux se sont enfuis ou nous snobent, les arbres portent les noms des morts, et les nuques des femmes rappellent les poids qui pèsent sur elles.
Mais, quelque part, l’espoir n’est pas mort, simplement il s’effiloche comme un tissu trop fragile.
©Pauline Alioua |
Bien souvent nous vivons trop comme si nous étions immortels, ou plutôt en oubliant ce que nous savons inéluctable. Certainement par peur, peut-être aussi parce qu’il pourrait être assez désespéré de penser sans cesse à notre finitude.
FRAGILE (handle with care) est là pour nous ramener à la réalité. Nous sommes mortels, et nous ne cessons de mourir à chaque instant. C’est aussi, peu ou prou, ce que nous disent les textes bouddhistes d’ailleurs. Par mort, il ne faut toutefois pas entendre simplement la fin de vie. Pauline Alioua nous invite à comprendre que la fragilité fait partie de la condition humaine. Fragilité de la vie, mais aussi de l’amour, de la liberté, de tant de choses qui nous paraissent si évidentes.
Simone de Beauvoir a écrit dans le Deuxième Sexe : « N’oubliez pas qu’il suffira d’une crise économique, politique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. » Cette phrase pourrait servir, aussi, de chapeau au travail de Pauline Alioua.
Bien qu’elle ne traite pas spécifiquement de la condition féminine dans FRAGILE (handle with care), il apparaît que ce que dit la philosophe peut s’extrapoler à nos existences.
©Pauline Alioua |
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