Ghost Town – Mathieu Van Assche
La ville est là à nos pieds. Noire, un peu sale, neigeuse. Et Mathieu Van Assche en fait son terrain de jeu ou de chasse, on ne sait pas trop et c’est très bien ainsi.
Avec son nouveau fanzine, Ghost Town, paru chez l’éditeur américain Tour Dogs, le photographe belge poursuit cette exploration inlassable d’une ville immense, inédite, faîte de vides, de vents et d’ombres. Avec lui toutes les villes ressemblent à Gotham, mais sans Batman.
©Mathieu Van Assche |
Il neige sur la ville. Le froid transperce de rares habitants qui semblent fuir dos courbé. Quoi, qui ? Rien ou tout.
A un carrefour s’érige un immeuble couvert d’échafaudages, les bâches claquent au vent et les chiens ne sont pas de gentils toutous.
La ville et ses fantômes ressemblent à un tombeau, une nécropole dans lequel le photographe déambule à la recherche d’on ne sait quoi. Un résultat ? Une réponse ? Mais à quelle énigme et à quelle question…
Alors, il va plus loin, au prochain carrefour, à la prochaine rencontre. La tension est palpable, le coeur bat à peine plus vite, tout est à découvrir même ce que nous connaissons.
©Mathieu Van Assche |
L’œuvre de Mathieu Van Assche se construit peu à peu, pas à pas, dans ces errances au cœur de villes innommables. Où sommes-nous ? Quand ?
Il est bien difficile de le savoir tant ces cités se ressemblent toutes, génèrent toutes des questionnements des interrogations. Les villes sont des êtres vivants, autonomes, tentaculaires et labyrinthiques. Elles ne sont ni belles, ni laides. Elles sont tout simplement.
Initiée avec ses ouvrages précédents (notamment Kleptoman 1 et 2) la photographie urbaine de Mathieu invite à la réflexion.
©Mathieu Van Assche |
Qu’est-ce que la ville ? Qu’a-t-elle à nous offrir ? Nous sommes bien souvent obnubilés par deux approches de l’espace urbain : un attrait touristique et un choix de résidence.
Par le premier nous voyons s’accumuler des hordes de touristes en des lieux définis et parfois, malheureusement, les touristes c’est nous. Mais que savent-ils de la ville ? Rien ou si peu. Quelques monuments, toujours les mêmes, quelques clichés galvaudés, des choses trop vues.
Par le second nous finissons, une fois installés dans une ville, par l’oublier. Les trajets du quotidien, les soucis personnels, la vie font que disparaissent les alentours, les bâtiments, la cité.
Mathieu Van Assche, lui, n’oublie rien, voit tout. Avec ses images il se veut exhaustif d’une réalité que nous ignorons ou délaissons. Ce qui pourrait passer pour des espaces délétères, sans intérêts, vagues devient l’élément central d’une photographie pleine d’étrangetés (renforcée par des manipulations sur les images).
©Mathieu Van Assche |
Lire Ghost Town c’est repenser ce que nous ne voyons plus, c’est prendre le temps de s’arrêter sur ces murs gris, ces structures d’acier et ça peu importe où nous sommes, peu importe le nom de la cité.
Il y a partout des lieux où personne ne va qui semblent déserts, vides de sens et d’habitants. Il y a partout des chiens aux yeux fous, des vieillards et des pluies glaçantes.
A nous de les voir. Et si vraiment nous n’y arrivons pas, alors plongeons avec délice dans les livres de Mathieu Van Assche.
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