Les mois noirs – Stéphane Lavoué
En ces temps estivaux on évoque souvent la Bretagne comme destination possible. Une Bretagne de pacotille trop souvent, avec ses menhirs, son bon air et ses crêperies.
Heureusement, à la lecture de Les Mois Noirs de Stéphane Lavoué, paru aux Editions 77, une autre réalité se dévoile.
©Stéphane Lavoué |
Stéphane Lavoué, après avoir parcouru le monde, s’est exilé dans le sud Finistère à la recherche d’un renouveau dans sa photographie. Il va le trouver à Cap Caval. Ici, durant ces mois d’hiver, les mois noirs, il se livre à un voyage aussi bien introspectif qu’à la rencontre de ceux qui sont la vie du pays. Voyage photographique, bien entendu.
Et l’issue de celui-ci est un livre dense, fort, où l’Homme et l’Océan sont sans cesse partenaires, complices. Où l’humain a enfin une place bien plus réelle que les fariboles pseudo-traditionnelles. C’est une Bretagne de fer, de glace qui est donnée à voir. Une Bretagne d’hiver, de pluies qui battent des jetées vides, tandis que les Hommes travaillent, gagnent leurs vies jour après jour, marée après marée.
©Stéphane Lavoué |
La photographie est picturale qui laisse place à un lent passage de lieux en lieux, de femmes en hommes, d’univers rudes à des visages à la douceur presque mystique, extatique.
Il y a une vraie force de vie dans ce livre.
Vie de ceux qui travaillent comme patron pêcheur, employée de marée, charpentier.
Vie de ceux qui ne quittent pas la région parce qu’il y a là des racines à ne pas trancher, des amis, des amours, des joies et des peines à ne pas abandonner.
Hurlement du vent, océan déchaîné, le monde est immense, les gens minuscules.
Et cette force le photographe nous la transmet avec pudeur et délicatesse, touche par touche, comme un long poème.
©Stéphane Lavoué |
Bien entendu, l’océan revient, dans le ressac des pages, brouillé par le vent, la pluie.
Tempête.
Mais après tout, c’est inévitable, comme tout ce qui advient et les finistériens s’en accommodent.
Alors, Stéphane Lavoué nous prend par la main, guide esseulé de ces moments de demi jour. Et dans ses pas, se révèle, enfin, un monde qu’il serait vain d’occulter.
L’Humain est au cœur de ce livre, bien plus que la mer. Et c’est assurément ce qui donne une dimension d’importance à l’ensemble.
Parce que sans l’Homme, les lieux ne sont rien d’autre que des espaces un peu creux, carte postale vite oubliée.
Et sans Homme pour faire vivre et contempler ces lieux à la titanesque beauté, auraient-ils autant de pouvoir ?
La question ne se pose plus une fois le livre refermé.