L’or des fous – Nathalie Bihan
L’or des fous de Nathalie Bihan, paru aux éditions Autonomes, laisse une fois refermé un sentiment d’abandon, de mélancolie vague, d’incertain.
Fruit d’une résidence à Saint Pierre et Miquelon en 2018, le fanzine se présente sous forme d’un cahier aux feuilles noires contenant des photographies imprimées avec des encres or et gris perlé.
L’objet est beau, presque luxueux. Du moins, il donne un sentiment de préciosité.
©Nathalie Bihan |
Ouvrant sur un texte de Fabien Ribéry aux accents méditatifs, page après page, s’étirent des photographies du quotidien de l’île.
Voitures imposantes, épaves.
Bâtiments vides, en construction.
Rails.
Déserts.
Des visages d’habitants, aux sourires rares, surgissent, tantôt rehaussés par l’or, parfois enfoncés dans les ténèbres du gris bleuté.
©Nathalie Bihan
Et c’est de ça dont il s’agit. De cette oscillation permanente entre l’espoir, la quête de cet or, de cette joie, de ces espoirs.
Et le quotidien de ces îliens loin de tout. Comme abandonnés du monde.
Faut-il fuir cet endroit ?
Gagner la proche Amérique du Nord aux devenirs clinquants et commerciaux ? Y voir un Eldorado ? Pourquoi ne pas regagner la métropole française, si proche, si lointaine ?
Et se heurter à ces vains espoirs des chercheurs d’autrefois.
Trouver la pyrite où les ors n’existent pas.
Faut-il rester dans ce lieu désolé mais si vaste, envoûtant, aux ciels immenses, entre l’Océan, la forêt et soi ? Abandonner les rêves, rester au concret de l’instant, à la douceur de la beauté.
Qui sait…
L’incertitude. C’est finalement ce qui va rester une fois la dernière page tournée. Ce sentiment que tout n’a pas été dit.
Parce que l’indicible.
Parce qu’il faut savoir, parfois, taire les choses.
Parce que même nous, nous ne sommes pas certain.
L’or des fous de Nathalie Bihan sera peut-être une porte vers ailleurs.
Peut-être pas.
Et c’est le mieux qui pouvaient advenir.